23/01/2015

Sur Tchekhov


Entièrement d'accord ! Vive Anton Tchekhov.

Article du Monde Magazine de cette semaine :


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24 janvier 2015Origines complexes.
Théâtre

Luc Bondy "Tchekhov, c'est Shakespeare et Beckett réunis."

Luc Bondy met en scène "Ivanov", de Tchekhov, à L'Odéon-Théâtre de l'Europe qu'il dirige depuis Mars 2012. il nous parle de son amour des textes et des comédiens : marina Hands, michel Bozonnet, Micha Lescot...

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Vous avez monté une soixantaine de spectacles, et seulement deux Tchekhov (Platonov et La Mouette)...

C'est vrai, même si, bizarrement, j'ai l'impression que je l'ai monté souvent. Tchekhov, c'est tout un monde, c'est Shakespeare et Beckett réunis. C'est un auteur formidable, à l'incroyable dramaturgie. J'aime le relire : ses nouvelles, sa correspondance ou encore les notes de son voyage sur l'île de Sakhaline sur les conditions des bagnards. Mais Tchekhov, c'est aussi pour moi un homme très généreux et un être humain assez remarquable.

Pourquoi Ivanov ?

C'est un texte qui m'intéresse depuis longtemps. Une pièce de jeunesse, mais dans laquelle la structure et les thèmes tchekhoviens sont déjà présents. A 35 ans, Ivanov n'en peut plus. S'il vivait aujourd'hui, on dirait qu'il fait un burn-out.

Justement, Tchekhov a écrit deux versions de sa pièce . Laquelle avez-vous décidé de mettre en scène ?

La première - que je trouve plus moderne, dans laquelle Ivanov s'effondre, épuisé. Pour moi, la seconde, dans laquelle il se tire une balle dans la tête, est beaucoup plus conventionnelle. J'ai choisi une fin beckettienne : un personnage qui se suicide, c'est psychologique ; un personnage qui finit, c'est ontologique !

Représentant juif d'une culture Mitteleuropa du xxe siècle, vous travaillez comme un talmudiste qui relit le même texte pour atteindre des couches de plus en plus secrètes...

Je pense en effet que, s'il y a une vérité qui surgit, ce n'est pas parce que tout a été aplani, bien au contraire, mais parce que tout a été fouillé. Pour moi, Ivanov est aussi une pièce sur l'antisémitisme - ce qu'on appelait, avant l'Holocauste, l'antisémitisme de salon. Ivanov a épousé Sarah qui, parce que convertie par amour, se fait déshériter et qu'il menace de traiter de " sale juive ". On sait d'ailleurs que Tchekhov était un ardent dreyfusard - ce qui était alors assez inhabituel en Russie.

Vous avez repris de nombreux comédiens de votre Tartuffe : Victoire du Bois, Yannik Landrein, Micha Lescot...

Oui, c'est une espèce de troupe que j'ai créée, et l'alchimie entre les acteurs est pour moi essentielle. J'ai une chance énorme. Ils sont tous parfaits, c'est-à-dire tout à fait eux-mêmes. Je ne crois pas à la notion de personnage. Je ne pars d'ailleurs jamais d'un personnage, mais de quelqu'un qui peut le rejoindre à partir de ce qu'il est, lui.

Vous êtes à mi-parcours de votre mandat à l'Odéon. Pouvez-vous esquisser un premier bilan ?

Le théâtre est rempli et l'on refuse des abonnés (au nombre de 12 000) pour ne pas jouer à guichet fermé. Par ailleurs, les spectacles sont joués plus longtemps, soixante fois minimum, et cela afin que les productions soient amorties et vues par un plus grand nombre.

propos recueillis par Emilie Grangeray

Ivanov, d'Anton Tchekhov. Mise en scène de Luc Bondy. Odéon-Théâtre de l'Europe, place de l'Odéon, Paris 6e. Du 29 janvier au 1er mars, puis du 8 au 29 avril. Tél. : 01-44-85-40-40. De 6 à 38 €. www.theatre-odeon.eu

© Le Monde


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http://www.lemonde.fr/journalelectronique/donnees/libre/20150124/index.html?cahier=MAG


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